Réédition du Cahier de l’Herne La Franc-maçonnerie:

documents fondateurs" avec les livres de Patrick Négrier Textes fondateurs de la Tradition maçonnique 1390-1760, Paris, Grasset 1995, et La Franc-maçonnerie d’après ses textes classiques. Anthologie 1599-1967, Paris, Detrad 1996 et celui de Philippe Langlet Les Textes fondateurs de la franc-maçonnerie. Tome I, Dervy

par Roger Dachez

Ces quatre ouvrages ont en commun le fait de présenter des traductions françaises de textes en anglais fondateurs de la franc-maçonnerie.

Le premier ouvrage est une réédition en fac-similé d’une précédente édition de 1992 publiée sous la direction de Frédérick Tristan. Il n’est pas exagéré de dire que les traductions proposées, si elles furent d’abord publiées dans la revue Villard de Honnecourt –du temps de son âge d’or-, sont très largement issues d’une loge d’études et de recherches de la Loge Nationale Française, la Loge Louis de Clermont. L’ouvrage donne des traductions tout à fait correctes et surtout replace les textes dans leur contexte historique. Très accessible, cet ouvrage est à recommander.

Les ouvrages de Patrick Négrier –auteur qui est aussi fondateur de rite maçonnique- donnent, malgré quelques approximations, une assez bonne traduction des textes. Cet auteur publie également, outre le Discours de Ramsay, quelques autres textes français.

Philippe Langlet donne une traduction très exacte, complète, savante et, d’un point de vue sémiologique et linguistique, idéale. Mais cette vision littérale s’écarte parfois du plan traditionnel. L’ouvrage est d’un accès difficile.

L’intérêt de ces textes fondateurs a été souligné en 1943 par la publication des Early Masonic Catechisms de Knoop, Jones et Hammer. Connus par Marius Lepage (1902-1972), secrétaire général de préfecture à Laval (Mayenne), Vénérable Maître de la Loge Volney qui aimait se comparer, arguant d’un moment de l’installation ésotérique d’un maître de Loge, à l’évêque de la dite ville, quelques extraits de l’ouvrage sus dit, traduits en français, furent publiés par ses soins dans la revue Le Symbolisme. Il fera connaître ce livre à René Guilly qui n’eût, dès lors, de cesse de l’étudier à fond puis de le traduire. Il s’agissait, dans son esprit, de retrouver l’esprit de la première maçonnerie spéculative. Ce travail acharné se poursuivit, entre autre, dans la Loge Louis de Clermont. Les revues Renaissance traditionnelle et Villard de Honnecourt ont publié, en leur temps, des fruits de ces travaux.

La découverte de ces textes constitue un moment privilégié dans l’historiographie maçonnique. Jusque là, l’histoire de la franc-maçonnerie était souvent une histoire légendaire. Avec ces textes, c’est une histoire documentée qui apparaît et qui donnera naissance, entre autre, au concept de « signification traditionnelle » des éléments originels de la maçonnerie, remplaçant les délires symbolistes. Par exemple, on prendra conscience que la première maçonnerie française est issue de la première tradition maçonnique anglaise, celle dite des « Modernes », et que l’esprit initial de cette première maçonnerie est donc surtout à rechercher dans la culture britannique qui a produit ces textes fondateurs. On découvre ainsi, comme l’exprimait fortement le professeur Antoine Faivre, que la tradition aussi a une histoire.