UN MYSTIQUE LYONNAIS ET LES SECRETS DE LA FRANC-MACONNERIE, JEAN-BAPTISTE WILLERMOZ 1730-1824,

par Alice Joly, archiviste-paléographe. Avant-propos et index par Antoine Faivre. Editions Télètes, 329 pages. 38 euros.

par Jacques Rondat

Cet ouvrage est la reproduction intégrale de l’édition de Mâcon de 1938. Il a été achevé d’imprimer en septembre 2008. Ecrit il y a 70 ans, il demeure un classique en matière d’histoire maçonnique. Alice Joly, profitant de sa position d’archiviste-paléographe a su exploiter le fond Willermoz archivé à la bibliothèque municipale de Lyon. Antoine Faivre dans son avant-propos indique que depuis lors, d’autres documents ont été découverts qui ne modifient pas grand-chose à la connaissance de la vie et de l’œuvre de Jean -Baptiste Willermoz mais complète celle des relations maçonniques qui se sont tissées, pendant le denier tiers du 18e siècle. Il s’agit des documents suivants : Ceux du château Le Brigon, conservés à la bibliothèque municipale de Lyon depuis 1956, et le fonds Bernard Frédéric de Turckheim découvert par Antoine Faivre en 1968. Une autre partie de ce fonds a été découverte par Jules Keller en 1984. Un ouvrage reprenant ces documents est en préparation par Jules Keller et Antoine Faivre.

Le livre, de lecture facile et agréable, est structuré en 14 chapitres qui analysent la longue vie de Willermoz. Les notes à chaque fin de page facilitent le travail du chercheur. Pour le lecteur ne connaissant pas le Rectifié, il est probablement difficile d’apprécier l’importance des débats, de comprendre la pensée et les concepts de Willermoz. En fait, le sujet pourrait être «les actes de Willermoz». Il n’est pas très aisé de résumer cette somme très dense. Néanmoins, on peut retenir dans l’œuvre d’Alice Joly les points importants suivants :

  • L’entrée en apprentissage de Willermoz à Antoine Bagnon, commerçant à Lyon en1745, et l’installation à son compte dés 1754 comme maître fabricant ;
  • L’initiation de willermoz en 1750 ;
  • La Grande Loge des Maîtres Réguliers de Lyon ;
  • Le Chapitre de l’Aigle Noir Rose-Croix ;
  • L’ordre des Chevaliers Elus-Coens et son fondateur Don Martinés de Pasqually ;
  • Louis-Claude de Saint-Martin ;
  • Le Traité de la Réintégration des Etres ;
  • L’ordre Allemand de la Stricte Observance ;
  • Le Chapitre du directoire d’Auvergne et de la bienfaisance ;
  • L’institution des grades supérieurs de la profession ;
  • Les séances du convent des Gaulles ;
  • L’Ordre des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte ;
  • Le convent de Wilhembad ;
  • Les Règles maçonniques à l’usage des loges réunies et rectifiées ;
  • La découverte du magnétisme animal par Messmer ;
  • Le Marquis de Puységur et la découverte du somnambulisme ;
  • La doctrine de l’agent inconnu ;
  • La période révolutionnaire ;
  • Les Charges et les vicissitudes du rétablissement de l’Ordre Rectifié ;
  • La mort de Willermoz le 29 mai 1824.

Il faut constater l’importance et la richesse de cette biographie de Willermoz dont la vie commence sous Louis XV et se termine sous Louis XVIII en passant par la Révolution et l’Empire. Plus de 500 personnages sont répertoriés dans l’index établi par Antoine Faivre. Parmi les plus cités, nous pouvons retenir : Bacon de La Chevalerie, le duc de Brunswick, le duc d’Havré de Croy, Le prince Charles de Hesse, le baron de Hund, Martinés de Pasqually, Millanois, Paganucci, Perisse-Duluc, le baron de Turckheim, Saltzman, Saint Martin, le comte de Virieu.

Sans faire le portrait psychologique de Willermoz, Alice Joly montre, sans concession, au cours des pages sa personnalité et son caractère. Il est difficile de penser qu’il fût un mystique au sens où on l’entend aujourd’hui.

Peut être l’exercice de son activité de producteur et de négociant qui demande du pragmatisme l’en empêcha.

Alice Joly emploie très souvent le terme occultiste. Jean Pierre Brach a indiqué que c’est Jean Pierre Laurant qui a découvert que ce terme apparaît en 1842 dans le dictionnaire des mots nouveaux de G. de Radouvilliers . Préférons avec Antoine Faivre les termes de maçonnerie ésotérique lyonnaise. Par ailleurs, il aurait sans doute été intéressant de produire en annexe une sélection des meilleures lettres écrites ou reçues par Willermoz.

En conclusion, remercions Alice Joly d’avoir écrit un livre aussi indispensable et regrettons de ne pas pu rencontrer une personnalité aussi considérable que celle de Jean Baptiste Willermoz.