The Plumbline. The Quarterly Bulletin of the Scottish Rite Research Society.
Winter 2008-09. Volume 15, N°4.
(Bulletin trimestriel de la revue Heredom publié aux Etats-Unis d’Amérique)
Dans son article, In Praise of Early Emphemera (pp. 6-7), Yasha BERESINER met ainsi l’accent sur les premiers tracts antimaçonniques.
Les témoignages les plus anciens attestant d’une hostilité à l’encontre de la Franc- Maçonnerie apparaissent, en effet, à la fin du XVIIème siècle et au début du XVIIIème siècle au travers des placards, des libelles anonymes, imprimés sur une feuille volante et distribués de la main à la main ou par voie d’affiche en vue d’informer l’opinion publique sur un sujet d’actualité. La fragilité du support explique d’ailleurs l’extrême rareté de tels documents.
L’unique exemplaire de l’un de ces placards, conservé à la British Library, est intitulé The Free- Masons Vindication, Being An Answer to a Scandalous Libel.
Imprimé recto verso et dépourvu de date comme de signature, ce tract est une réponse incisive à la divulgation Le Grand Mystère des Francs- Maçons découvert dont la seconde version a été publiée à Londres en 1725.
Comme ce document se trouve dans un corpus regroupant un ensemble de textes ayant trait à l’Irlande, plusieurs historiens maçonniques ont soutenu, à tort, que ce tract pouvait également avoir une origine irlandaise alors que son unique objet est de dénoncer la Maçonnerie londonienne.
Ce placard a vraisemblablement été rédigé par un Franc-Maçon car il comporte la mention Nous de cette Société.
Le second libelle, A toutes les Personnes Pieuses de la Cité de Londres, a été découvert par le Frère Albert FROST de Sheffield qui en a fait don, en 1943, à la Bibliothèque de la Grande Loge Unie d’Angleterre.
Daté de 1698 et attribué à un certain Mr Winter, ce tract dénonce les Francs- Maçons comme des Crypto-Catholiques et la Maçonnerie comme une secte maléfique en raison du secret pesant sur ces lieux de réunion et ses serments.
Dans leur analyse succincte, An Anti-Leaflet, parue dans les Ars Quatuor Coronatorum 55 (1942) p. 152, Douglas KNOOP et G.P. JONES ont mis en exergue certaines contradictions de ce texte. Ainsi, en opposition avec les règles et les usages actuels, les obligations sont dirigées contre tous ceux qui ne suivent pas leurs pratiques tandis que le terme de Freed-Masons Maçons affranchis) est directement emprunté à la Vénérable Compagnie des Maçons de la Cité de Londres établie en 1472.
En revanche, l’accusation lancée par l’auteur, proche très probablement des courants chiliastes (ou millénaristes) contre les Francs- Maçons assimilés à des Antéchrists, terme utilisé pour désigner les adeptes des thèses anti-trinitaires, confirmerait ainsi la conception déiste de la religion exprimée par la Maçonnerie, une vingtaine d’années avant que le Pasteur ANDERSON ne la formule explicitement dans ses Constitutions de 1723.
Discussion :
En 1996, dans la RL William Preston, Gérard Gefen avait noté que dès l’origine, l’anti-maçonnisme primitif a fait ressortir plusieurs thèmes principaux : 1° l’athéisme (aussi appelé déisme), 2° la mystagogie, 3° les complots secrets (ou leur simple possibilité) contre l’ordre public, 4° l’amoralité, la débauche, l’ivrognerie et les penchants contre nature, 5° la futilité, 6° le crime. Ce dernier thème est présent dans le premier texte anti-maçonnique connu « To all Godly People » de 1698 [in Knoop, Jones and Hammer: Early Masonic Pamphlets, p. 34. A.Q.C. Correspondance Circle. On lira aussi: J. Chetwode Crawley « Contemporary comments on the Freemasonry of the Eighteenth century », A.Q.C.]. Un seul thème viendra plus tard, au XIXème, c’est celui du complot judéo-maçonnique.