Ars Quatuor Coronatorum,

vol. n°131, 2018.

Dans le volume 131 (année 2018) de la revue Ars Quatuor Coronatorum, deux « papers » attirent particulièrement l’attention : « Quatuor Coronati Lodge Symposium ‘1717 and All That’ » et « The Noah Legend and the Graham Manuscript » par E. John T. Acaster. Le premier « paper » qui contient les contributions de John M. Hammill, des Prof. Andrew Prescott et Susan M. Sommers, et Dr. Ric Berman et autres clôt définitivement le débat relatif à la date de fondation de la première Grande Loge du monde, traditionnellement fixée à 1717. Il n’en est rien. Il y avait quelques Loges naturellement à cette époque mais elles n’ont pas fondé de Grande Loge au sens institutionnel du terme. Il faudra attendre le début des années 1720. Elles se regroupaient simplement pour former, le jour de la fête de Saint-Jean-Baptiste, une Loge plus « grande » qu’en temps normal, présidée par un Maître qualifié alors de « Grand Maître » et, pourrions-nous ajouter malicieusement « Grand Maître d’un jour »… C’est James Anderson qui, dans la 2e édition des Constitutions en 1738, racontera l’élection du 1er Grand Maître en 1717, sans y avoir participé lui-même. C’est lui aussi qui introduira la référence à Noé dans l’article I concernant Dieu et la Religion (référence supprimée dans la 3e édition des Constitutions). On a voulu y voir une allusion à une sorte de religion naturelle dépassant le christianisme mais, en dehors du fait qu’Anderson était chrétien, c’est oublier qu’en milieu chrétien –et l’Angleterre est chrétienne- toute référence à l’Ancien Testament est considérée comme une préfiguration du Nouveau.

Le personnage de Noé nous amène tout naturellement au 2e « paper » cité et qui complète heureusement le précédent. J. Acaster démontre sûrement que le manuscrit Graham est de 1726 et, au passage, que le manuscrit Essex jusqu’alors daté du milieu du XVIIIe siècle est lui aussi daté du milieu des années 1720. L’importance du manuscrit Graham réside dans le fait qu’il contient tous les ingrédients qui vont fonder la légende du grade de Maître publiée en 1730, c’est dire son importance pour l’essor de la Maçonnerie spéculative.